Contrairement aux idées reçues, construire en paille est une technique qui s’inscrit pleinement dans le 21ème siècle !
Mais elle est encore méconnue et peu répandue en France.
Chacun garde en effet en tête la maison en paille des 3 Petits Cochons, qui s’envole au moindre coup de vent. C’est certain, cela ne donne pas envie pour construire sa maison.
Seulement, s’est développé depuis ce conte du 18ème siècle une technique « redoutable » : la botte de paille 😉 !
Et ça change tout.
Désormais, cette paille compressée offre une résistance mécanique permettant de l’utiliser en matériau porteur, qui plus est isolant et résistant au feu.
« La paille est un matériau local, très bon marché, sain et renouvelable. »
Idéal pour relever les défis sociétaux et environnementaux que nous connaissons !
Déjà convaincu-e ? 😊
Un peu d’histoire…
La paille correspond à la tige récoltée lors de la moisson de certaines céréales (blé, avoine, seigle, orge, riz…). Une fois assemblées, ces tiges composent ainsi les bottes de paille.
C’est là que l’histoire commence…
A l’arrivée des premières presses mécaniques à la fin du 19ème siècle, les agriculteurs se mettent à utiliser ces bottes compressées pour construire leur maison. Apparue au Nebraska aux Etats-Unis, cette technique de « paille porteuse » a gardé le nom de sa région d’origine encore aujourd’hui.
En France, la 1ère maison à ossature bois et isolation en bottes de paille sort de terre dans les années 1920 grâce à l’ingénieur Feuillette. L’idée était de construire des maisons peu chères dans le cadre de la reconstruction qui a suivi la 1ère Guerre mondiale. Elle est la plus ancienne construction de ce type en Europe, et abrite aujourd’hui le siège du Réseau Français de la Construction Paille. Le RFCP œuvre pour la promotion du matériau paille dans la construction en établissant notamment les règles professionnelles.
La maison « Feuillette » à Montargis, (crédit CNCP)
C’est grâce à ce travail d’expérimentation et de validation que l’Agence Qualité Construction reconnaît enfin la construction en paille en… 2012.
Les techniques de construction
Depuis l’apparition de la technique « Nebraska », d’autres modes constructifs se sont développés pour l’emploi de la paille.
Attention, malgré une apparente simplicité, le matériau paille s’utilise en respectant des règles strictes pour garantir la pérennité de la construction et la sécurité des compagnons sur le chantier.
La paille porteuse
C’est donc la méthode d’origine dite « Nebraska » : le principe consiste à empiler des bottes compressées pour élever les murs.
Les bottes reposent sur un soubassement en dur (généralement en béton) muni d’une lisse basse en bois. En haut du mur, une panne sablière (ou lisse haute) permet d’assurer l’équerrage et de répartir les charges. Des tiges verticales en bambous ou en métal participent également à la stabilité de l’ensemble.
Méthode « Nebraska » (Crédit La Maison en Paille)
Enfin, la réalisation d’un enduit à la chaux joue un rôle dans le contreventement.
Enduit sur mur en paille (Crédit La Maison en Paille)
La technique « à ossature bois »
Cette technique consiste à remplir une structure porteuse à ossature bois par les bottes de paille. La paille n’est plus porteuse mais joue le rôle d’isolant et de support d’enduit. Elle peut être appliquer aux murs, planchers et toitures. C’est la plus utilisée aujourd’hui.
Mur à isolation paille (Crédit EcoPéli)
La technique du GREB
Développée au Québec dans l’Écohameau de la Baie, cette technique reconnue est une variante de celle à ossature bois.
Elle se compose d’une double ossature bois au sein de laquelle on vient ensacher les bottes de paille. Un mortier chaux-sable-ciment-sciure de bois est appliqué de part et d’autre de la paille, entre celle-ci et l’ossature bois.
Méthode « GREB » (Crédit Terre Mère)
Quelques précautions à prendre
« La paille a un ennemi : l’eau. «
C’est LE sujet principal sur ce type de chantier. Il est essentiel d’y faire attention dès l’achat.
Ainsi, voici quelques règles simples à suivre :
- Assurer vous que les bottes que vous achetez ont un taux d’humidité < à 20%
- Sur votre chantier, prévoyez un abri pour stocker les bottes, jour et nuit
- Lors de la mise en œuvre, il est primordial de séparer les bottes des sources d’humidité par un soubassement en dur, une réhausse d’au moins 20cm, un pare-pluie ou un parement extérieur, et un pare-vapeur intérieur.
Comme beaucoup de matériau dit « bio-sourcé », la paille humide s’affaisse (ce qui diminue sa capacité d’isolation) et finit par pourrir.
Il y a un autre point de vigilance à avoir en tête en permanence sur le chantier : le risque incendie.
La paille a une très bonne résistance au feu une fois mise en œuvre, mais les brins de paille en vrac disséminés un peu partout sur le chantier peuvent être très inflammables.
Un conseil : balayer le site tous les soirs pendant le chantier !
La paille : un matériau d’avenir…
A l’opposé des solutions high-tech qui fleurissent chaque année, le matériau paille est définitivement « low-tech ».
Et c’est paradoxalement ce qui en fait un matériau d’avenir !
Disponible partout
On trouve de la paille à peu près partout dans le monde. Issue des cultures, elle est présente là où il y a des hommes, et donc là où on en a besoin.
En abondance
La paille est un co-produit de l’agriculture. Elle est abondante en France (près de 50 millions de tonnes par an, dont seulement 1% permettrait d’isoler 50 000 logements).
Crédit RFCP
Économique
C’est l’isolant le moins cher sur le marché. Il faut compter environ 5€/m² contre 10€/m² pour un isolant en laine minérale (issu de la pétrochimie).
Sûr
La paille compressée possède des propriétés mécaniques qui permet de réaliser des murs solides (et sains !). En outre, avec un parement de type enduit, elle est très résistante au feu.
Ces caractéristiques, reconnues par la Commission Prévention Produits (C2P) permettent donc d’en faire un matériau assurable, comme les autres produits de la construction. Les assureurs et les banquiers vous accueilleront donc à bras ouvert 😉 (normalement) !
Crédit EcoPéli
Écologique
La paille est une ressource renouvelable, produite localement et recyclable. Le matériau paille ne nécessite que très peu de transformation, ni de transport, à la différence des autres matériaux de construction conventionnels comme la brique ou le béton.
Quel que soit la technique utilisée, l’épaisseur des murs est à minima égale à celle d’une botte de paille standard, à savoir généralement 37cm.
Cela permet d’avoir un très bon niveau d’isolation thermique.
Crédit RFCP
Elle participe donc pleinement à la préservation de notre environnement et à la lutte contre les émissions de gaz à effet de serre.
Un matériau qui se partage
C’est peut-être ce qui la distingue le plus des autres matériaux. La paille favorise le partage, le lien social, et l’économie locale.
Son utilisation nécessite en effet plus de main d’œuvre, ce qui la rend idéale pour les chantiers participatifs.
De plus, la filière étant encore peu structurée, il est donc fréquent que l’on s’approvisionne auprès des agriculteurs locaux. Pour eux, c’est un bon moyen de valoriser cette matière secondaire et de compléter leurs revenus.
Crédit Approche Paille
Si vous recherchez une expérience singulière et une aventure humaine forte pour votre projet, la paille est le matériau qu’il vous faut !
Pour aller plus loin
Des guides gratuits sont disponibles en ligne pour vous aider dans votre apprentissage. Mais il est fortement recommandé de vous former avant de vous lancer. De nombreuses associations proposent ainsi des formations sur ces techniques (voir liens dans la rubrique Ressources à la fin de l’article).
Et l’idéal est de rejoindre un chantier participatif pour bien se faire une idée 😉 !
Bonne continuation !
Et si le sujet vous a plu, partagez-le autour de vous !
Ressources
Informations :
Formations – Stages :
- Écocentre du Périgord Limousin
- Association Approche Paille
- Association Oïkos
- La maison en paille
- Chantiers participatifs : Twiza
Livres :
- La construction en paille, Principes fondamentaux, Techniques de mise en oeuvre, Exemples de réalisations, Luc Floissac, Terre Vivante éditions.
- Règles Professionnelles de construction en paille, Remplissage isolant et support d’enduit, RFCP, Le Moniteur éditions.
- La révolution d’un seul brin de paille, Masanobu Fukuoka, Guy Trédaniel éditeur. Un essai sur l’agriculture « sauvage », la nature et la vie !
Crédits photos
- La Case Robinson
Bonjour,
J’aimerais construire une maisonnette en paille porteuse sans fondation 53 m2 extérieur 40 m2 intérieur, en dimension maxi et avec des matériaux récupérés ou recyclés. voila mon projet , mais j’ai besoin de conseils bénévoles et gratuits uniquement par courriel pour débuter.
Paille: Je crois pouvoir faire les bottes moi même et peut-être resemer pour cela.
Me manque la base ‘sans fondations’ et côté permis de construire.
Merci
En dehors des conseils que vous trouverez sur ce blog, ce que vous pouvez faire est de chercher un chantier participatif portant sur un projet similaire au vôtre. C’est une super façon d’apprendre, et c’est gratuit. Regardez par exemple sur les réseaux Twiza ou Oïkos. Bonne continuation !