La maison résiliente – avec Rémi Richart

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Je reçois Rémi Richart pour parler de sa maison résiliente. Énergie, eau, alimentation, assainissement, matériaux, Rémi dévoile comment il a transformé une vieille ferme de 200 ans en un habitat autonome et confortable. 

Parce que la maison est un abri, un lieu intime, parfois un miroir, mais aussi un lieu d’inspiration et de ressources, aujourd’hui je vous emmène dans la Case de Rémi Richart. 

Rémi a rénové en famille une maison qu’ils ont souhaitée la plus résiliente possible. 

Énergie, eau, alimentation, assainissement, tous les aspects de l’habitat sont pensés pour viser l’autonomie et la durabilité. 

Sensible aux enjeux environnementaux et aux crises sociétales actuelles, ils expérimentent ainsi une autre façon d’habiter, où l’apprentissage, la coopération et l’adaptabilité sont au centre de leur approche.

Rémi partage comment cette aventure a démarré, comment ils ont choisi leur lieu de vie et quels travaux ils ont menés sur cette ferme vieille de 200 ans pour la rendre confortable et résiliente. 

Merci à Rémi pour cette belle discussion.

Je vous souhaite un très bon épisode !

Notes de l’épisode

Pour contacter Rémi : 

Les ressources mentionnées par Rémi : 

Maison résiliente et autonome – Rémi Richart

Introduction : de la prise de conscience à l’action

  • Rémi Richart a rénové en famille une ferme de 200 ans dans le Cantal avec un objectif clair : tendre vers une maison résiliente et, lorsque c’est pertinent, une maison autonome.

  • Contexte : inquiétudes climatiques et sociétales, volonté d’émancipation (moins dépendre des systèmes centralisés), recherche d’apprentissages concrets et de coopération locale.

  • Démarche : partir de ses besoins réels, réduire la demande, puis outiller la maison pour basculer facilement entre réseaux publics et systèmes autonomes (électricité, eau, assainissement, chaleur, alimentation).


1) Clarifier les termes : autarcie, autonomie, résilience, adaptabilité

1.1 Autarcie

  • Réflexe de repli sur soi : « tout faire seul, pour soi ».

  • Peu durable et irréaliste : compétences et ressources trop nombreuses, charge trop lourde.

1.2 Maison autonome (autonomie)

  • Recherche d’une capacité à produire/assurer soi-même une partie de ses besoins.

  • Inclut la coopération (échanges de savoir-faire, mutualisations locales).

  • Limites : coûts et compétences élevés, dispersion des efforts si l’on vise « tout, tout de suite ».

1.3 Maison résiliente

  • Cible pragmatique : tendre vers l’autonomie là où c’est pertinent et selon ses moyens.

  • Stratégie : réduire la dépendance au système tout en restant connecté (double ou triple systèmes).

  • Outil clé : stress tests (couper un mois le réseau, mesurer, apprendre, ajuster).

1.4 Adaptabilité (la « compétence n°1 »)

  • Plutôt que d’accumuler du matériel « au cas où », s’entraîner à s’adapter à l’inconnu.

  • Pilier éducatif pour la maison résiliente : développer souplesse, polyvalence, esprit d’apprentissage.


2) Choisir le lieu et le bâti : pourquoi une ferme ancienne ?

2.1 Raisons du choix

  • Cartographie des risques (pollution, stress hydrique) et ancrage familial → choix du Cantal.

  • Rénovation plutôt que neuf :

    • Une ferme a été autonome pendant des décennies : puits/source, annexes (stockage, bois), logique d’usage déjà en place.

    • Inertie d’été : les murs en pierre facilitent le confort estival (moins de surchauffe).

2.2 État initial et stratégie de rénovation

  • Maison très dépouillée : pas d’eau, pas d’électricité, terre aux murs → liberté d’aménager « propre ».

  • Travaux menés quasi intégralement en auto-rénovation (sauf dalle, crépi, portes).

  • Itérations et corrections : première isolation insuffisante → améliorations progressives (apprendre en faisant).


3) Priorités d’une maison résiliente : de l’eau à l’énergie

3.1 L’eau : priorité vitale

  • Inventaire des ressources avant achat : puits/forage/source, possibilité de récupération d’eau de pluie (surfaces, autorisations), lac/mare.

  • Systèmes multiples : réseau public + puits + récupération d’eau de pluie.

  • Stockage : montée en puissance par essais/erreurs (de 1 000 L à 18 000 L, puis cuves béton enterrées de 20 m³, conservant les anciennes cuves → ≈38 m³ au total).

  • Enterrement des cuves : éviter le gel printanier qui bloquait l’arrosage de serre malgré des cuves pleines.

  • Monitoring : connaître consommations (serre en été, douches, etc.) pour prioriser en période sèche.

  • Vertus de la résilience : dimensionner par étapes, recycler les matériels (récup’ en déchetterie, troc entre voisins), mutualiser.

3.2 Alimentation : autonomie coûteuse en temps

  • Objectif réaliste : une autonomie alimentaire complète peut absorber quasiment un temps plein pour une famille.

  • Décider selon :

    • Régime (végétarien, etc.), fertilité du sol, proximité des circuits courts.

  • Compétences de base à viser : faire ses graines, greffer, conserver/transformer, gérer les pics saisonniers.

  • Espaces supports :

    • Cave (zones « froid/humide » et « frais/sec » à reconstituer si elles n’existent plus).

    • Serre inertielle (préférer une serre avec inertie plutôt qu’un tunnel léger pour lisser humidité/température et allonger la saison).

3.3 Isolation, inertie, confort : la bonne séquence

  • Isoler avant de « produire » : gains durables et baisse des besoins.

  • Débat ITE/ITI :

    • Isolation par l’extérieur (ITE) : meilleure efficacité énergétique, inertie mobilisée, conso bois plus faible (retour d’expérience « Didier »).

    • Isolation par l’intérieur (ITI) : préserve l’esthétique pierre extérieure, mais inertie moins mobilisée → demande une gestion plus fine.

  • Thermomètres dans les murs : suivre les températures de parois et du cœur de mur pour piloter confort ressenti et stratégie de préchauffage solaire (voir § 3.5).

3.4 Électricité : maison autonome « à la demande »

  • Double système : raccord réseau (Énercoop) + installation autonome (panneaux PV + batteries).

  • Philosophie :

    • Préserver les batteries (élément le plus impactant et usant) → priorité au réseau tant que disponible et peu coûteux (consommation réseau très basse grâce aux PV).

    • Bascule automatique en cas de coupure/coût excessif/choix éthique.

  • Dimensionnement :

    • D’abord mesurer : puissance des appareils, consommation talon, pics (ex. broyeur 5 kW).

    • Réduire la demande : une maison occidentale standard (PAC chauffage, cumulus, etc.) ne peut pas être pleinement autonome sans baisse massive des besoins.

    • Surdimensionner les panneaux PV pour réduire la taille/sollicitation des batteries (mieux capter les jours « moyens »).

  • Capacité : installation PV ≈ les besoins d’un foyer de 5 personnes. Production excédentaire potentiellement partageable à terme.

3.5 Solaire thermique : eau chaude & plancher chauffant basse température

  • Capteurs thermiques : ≈12 m², avec ≈2000 L de stockage ECS/chauffage.

  • Atout : alimente un plancher chauffant basse température → précharge d’inertie à la fin de l’été/début d’automne pour éviter que les murs ne tombent trop bas (observations : cœur de mur à 26 °C en été, déclin à 17 °C à 730 m d’altitude).

  • Défi d’été : surproduction d’ECS (usure prématurée possible) → gestion par auto-vidange et usage collectif potentiel (eau chaude excédentaire pour plusieurs familles en été).

  • Pilotage : la température des parois est un indicateur clé du confort; viser des parois autour de 18–20 °C limite l’effet de « paroi froide ».


4) Assainissement, toilettes, et stratégies urbaines/rurales

4.1 Assainissement : entre réseau collectif et systèmes naturels

  • Tout-à-l’égout (TAE) : simplicité d’usage, maintenance externalisée… mais dépendance à des infrastructures fragiles/énergivores.

  • Phytoépuration :

    • Alternative résiliente si conforme/localement acceptable.

    • Avantage : en sortie, possibilité de mare (booster de biodiversité) et eau utile pour l’irrigation en été (prudence : ne pas vider la mare → protection de l’écosystème).

  • Toilettes :

    • Toilettes sèches : efficaces mais intrant nécessaire (sciure). Approvisionnement parfois payant et qualité de sciure variable (résineux mieux que chêne).

    • Usage extérieur apprécié par Rémi (moins d’odeurs dans la maison).

    • Lombricompostage (toilettes à lombrics) : « luxe » des toilettes sèches. Cuve en sous-œuvre, vidange très espacée (≈10 ans), matière stabilisée en terre. Exige d’anticiper accès et ouvertures.

4.2 Rural vs urbain : transpositions possibles

  • Rural : plus facile (surfaces, annexes, phyto, verger, stockage bois).

  • Urbain : possible mais contraint :

    • Panneau balcon (même en location) pour réduire la facture.

    • Récupération d’eau à petite échelle.

    • Collectif prioritaire : toitures mutualisées, AMAP, jardins partagés, associations locales, villes en transition.

    • Et toujours : isolation, sobriété, mesure des besoins.


5) Méthode générale : sobriété, double systèmes, mesure, itérations

5.1 Séquence de mise en œuvre

  • 1. Clarifier : où j’en suis ? de quoi ai-je vraiment besoin ? quel budget ? quoi apprendre moi-même ?

  • 2. Réduire la demande (isolation, inertie, appareils sobres, confort par parois).

  • 3. Multiplier les sources (électricité, eau, chaleur), avec connexions/déconnexions faciles et respect des règles (éviter contaminations croisées).

  • 4. Monitorer : compteurs d’eau/énergie, thermomètres (air/parois/cœur de mur).

  • 5. Tester : stress tests (un mois sans réseau, variations saisonnières), puis ajuster.

5.2 Apprendre en faisant (et avec les autres)

  • Se former sur des gestes clefs (graines, greffes, plomberie de base, débouchage…).

  • Réseaux locaux : artisans, voisins, récup’, entraide.

  • Itérer : commencer petit (1 000 L d’eau), observer, augmenter (→ 38 m³), enterrer, professionnaliser.


6) Dimensionnements & retours d’expérience (repères utiles)

6.1 Eau

  • Stocks : progression de 1 000 L → 18 000 L → 20 m³ enterrés en béton, en parallèle des anciennes cuves → ≈38 m³.

  • Pourquoi enterrer : éviter le gel printanier qui bloquait l’arrosage de serre.

  • Gestion : connaître les consommations (ex. serre ≈ 1 m³/jour en plein été) pour prioriser.

6.2 Solaire thermique & chauffage

  • Capteurs thermiques : ≈12 m².

  • Stockage : ≈2000 L. ECS + plancher chauffant basse température.

  • Stratégie : précharger la dalle fin été/automne (énergie solaire abondante) pour garder parois chaudes au cœur de l’automne.

6.3 Photovoltaïque & batteries

  • PV surdimensionné (panneaux « partout » sur dépendances), environ les besoins d’un foyer de 5 personnes.

  • Philosophie : max PV / min batteries, limiter les cycles, utiliser réseau au quotidien (Énercoop), bascule si besoin.

6.4 Isolation & inertie

  • Mesures en parois : cœur de mur jusqu’à 26 °C en été, descente à 17 °C début septembre (730 m).

  • Enjeu : empêcher que les parois passent sous le seuil de confort, d’où l’intérêt du plancher solaire automnal.


7) Low-tech et « surdimensionnement solidaire »

7.1 Low-tech : sobriété, réparabilité, robustesse

  • Favoriser des systèmes peu énergivores, réparables, compréhensibles (ex. machine à laver à pédale évoquée).

  • But : fiabilité à long terme, indépendance intellectuelle (comprendre et pouvoir dépanner).

7.2 Surdimensionnement solidaire

  • Idée : produire un peu plus que ses besoins lorsque c’est facile (panneaux PV, verger, four à pain, moulin à farine…).

  • Finalité : aider le voisinage en tension, contribuer à une résilience collective (pain au four commun, partage d’eau chaude en été, fruits excédentaires…).


8) Éducation & culture de l’adaptabilité

8.1 Éduquer à l’autonomie… des personnes

  • « Améliorer la maison résiliente n’a de sens que si l’individu devient plus autonome et résilient. »

  • Pistes mises en place :

    • École à la maison (période) pour condensation du programme le matin et ouverture l’après-midi (manuel, sport, culture).

    • Développer compétences manuelles et informatiques (anticipation des mutations liées à l’IA).

    • Nature : randos, cabanes, corps en mouvement → santé, repères, confiance.

    • Vie réelle : démarches administratives par les enfants, responsabilités progressives.

    • Épreuves formatrices : ex. marche d’orientation à la boussole → rite de passage.

8.2 Méthodes pédagogiques et socialisation

  • Inspiration Montessori/Freinet : « apprendre en faisant » → plus efficace et durable.

  • Éclaireurs de France : apprendre à vivre ensemble, organiser, fabriquer, dormir dehors → compétences sociales + techniques.

9) Gouvernance personnelle : raisons, motivations, éthique

9.1 Pourquoi s’y mettre

  • Rémi : dégoût de l’extractivisme (militantisme précoce), choc de 2004 sur la dépendance au pétrole, enchaînement climat/économie.

  • Objectifs : réduire l’impact, dépendre moins du pouvoir d’achat énergétique, cohérence entre valeurs et actes.

9.2 Éthique de la bascule

  • Double/triple systèmes choisis autant pour :

    • Sécurité (coupures, sécheresse),

    • Économie (prix),

    • Éthique (désaccord avec certaines offres ou modèles).

  • Ne pas s’enfermer : rester connecté, mais être capable de choisir.


10) Conseils pratiques pour amorcer une maison résiliente / autonome

10.1 Démarrer

  • Lister ses besoins réels (par poste) et mesurer (compteurs, wattmètres, thermomètres).

  • Prioriser l’eau : sécuriser une ressource indépendante (puits/pluie), stockage progressif, enterrer si gel.

  • Isolation & confort d’été :

    • Si possible, ITE pour l’inertie et les économies de bois.

    • À défaut, ITI + pilotage fin des parois (précharge solaire).

  • Énergie :

    • Réduire la demande (chauffage au bois, ECS sobre, effacement des pics).

    • PV généreux, batteries mesurées, réseau « backup ».

    • Thermique si plancher BT possible (gros levier sur le confort intersaisonnier).

  • Assainissement :

    • Si assainissement collectif : connaître ses limites (dépendances, risques).

    • Si possible : phytoépuration bien conçue (avec mare).

    • Toilettes : sciure disponible ? préférer lombricompostage si on peut intégrer la cuve dès la rénovation.

  • Stockage & transformations :

    • Cave (froid/humide et frais/sec), serre inertielle, séchage, conserves, lactofermentations.

  • Réseau humain :

    • Nouer des liens (artisans, voisins, récup’), intégrer des associations (AMAP, scouts/éclaireurs, ateliers partagés).

10.2 Monter en puissance (sans se perdre)

  • Itérer : mini-projets → mesures → ajustements → extension.

  • Surinvestir dans l’intelligence du système (monitoring, habitudes) plutôt que dans la quantité de matériel.

  • Mutualiser : quand c’est facile (four à pain, moulin, surplus PV/ECS/fruits).


11) Limites, angles morts, positionnements

  • Autonomie totale : très coûteuse, souvent illusoire sans sobriété radicale.

  • Urbain : faisable mais collectif indispensable ; le levier principal reste réduire les besoins et organiser l’entraide.

  • Réglementations : à respecter et/ou connaître pour ne pas mettre en péril les réseaux (cloisonner circuits, éviter retours d’eau).

  • Toilettes sèches : attention à l’intrant (sciure), qualité et logistique.

  • Surchauffe d’été (thermique) : prévoir protections (auto-vidange, dissipation), usages solidaires.

Conclusion : une maison résiliente pour des personnes autonomes

  • La maison résiliente n’est pas une forteresse d’autarcie : c’est une plateforme adaptable, capable de bifurquer entre réseau et maison autonome selon les saisons, les prix, les pannes et les convictions.

  • Les clés :

    • Sobriété d’abord (réduction des besoins),

    • Double systèmes (eau, électricité, chaleur, assainissement),

    • Mesure et pilotage (compteurs, thermomètres, stress tests),

    • Apprendre en faisant (et avec les autres),

    • Surdimensionnement solidaire (aider le voisinage quand c’est facile).

  • Au-delà des kilowattheures et des mètres cubes, la réussite tient à l’autonomie des personnes : compétences, coopération, adaptabilité.
    C’est cette culture qui transforme une maison en maison résiliente et un foyer en communauté d’entraide prête à traverser les variations du monde réel.


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